Double portrait

23 octobre 2006

Ce tableau de Fra Lippo Lippi, peint vers 1440, est l'un des premiers portraits italiens figurant l'intérieur d'une maison et sans doute le premier double portrait de l'art italien. L'homme est Lorenzo de Ranieri Scolari, la femme, Angiola di Bernardo Sapiti. Bien que leurs regards ne se croisent pas, ils sont mari et femme et le tableau commémore leur mariage, qui eut lieu à Florence quatre ans plus tôt. On peut d'ailleurs lire dans les broderies de la manche d'Angiola le mot "loyauté".

Le mariage n'était pas une cérémonie unique et clairement délimitée mais un long processus, qui pouvait s'étendre sur un an. Durant la cour, le couple s'échangeait des présents symboliques, tels que des gants, des bagues et des mouchoirs. Accepter un présent était un signe d'engagement, et ce geste faisait même office de preuve juridique au même titre que l'échange d'un baiser. Ensuite venait le contrat, auquel succédaient la promesse et la cérémonie de l'anneau (annellamento), étape clef où les époux échangeaient leurs promesses, scellées par un serrement de main. Dans sa maison, la fiancée recevait un anneau de fidélité, qu'elle plaçait au quatrième doigt, relié, disait-on, directement au cœur par une veine. Venaient enfin les noces en elles-mêmes avec la consommation du mariage et l'arrivée de la jeune mariée dans la maison de son mari, accompagnée de son trousseau. Mais ce qui a de quoi nous étonner, c'est que les époux pouvaient se passer de l'église : la cérémonie religieuse n'était pas une obligation légale avant le concile de Trente en 1563.

A l'exposition du Victoria & Albert Museum, At Home in Renaissance Italy, le tableau se retrouve dans son environnement originel, entouré d'objets attachés au mariage et à la vie matrimoniale : coffres à devises d'amour ( amore vol fe, dulce donum fides ; dulce est amare ), bijoux, ceintures, moule à gaufres gravé aux armes des familles pour le repas de noces, superbes coffres peints et sculptés (cassone), chemises brodées, ou encore tableau de Vénus par Sustris, destiné à la camera dei sposi, voilé le jour pour préserver la pudeur des enfants et découvert la nuit.

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