Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Le Divan Fumoir Bohémien
Le Divan Fumoir Bohémien
Publicité
Archives
Le Divan Fumoir Bohémien
Newsletter
14 octobre 2009

La veste d'Agnes et autres récits écrits à l'aiguille






manche_lulu

vesteluludet

Détails de la veste d'Agnes Richter.




Agnes Richter, couturière autrichienne,  fut internée contre son gré dans un hôpital psychiatrique de l'âge de quarante ans jusqu'à la fin de sa vie, vingt-six ans plus tard. Là, elle s'employa d'abord à défaire toutes les coutures de la veste de son uniforme de lin gris pour ensuite la remonter, en 1895, à sa propre manière, sans vraiment  dehors ni  dedans, après l'en avoir entièrement couverte en cinq couleurs différentes de phrases brodées, si denses et enchevêtrées qu'elles en étaient devenues par endroit illisibles, elle seule détenant le secret de cette seconde peau tatouée pourtant obstinément offerte à la vue de tous. Apparaissent  les mots "je", "mon", "enfant","sœur", "cuisinière","à travers mes bas blancs","mon habit","frère liberté","né le 19 juin 1873", avec le numéro de la blanchisserie "583 Hubertusburg" rebrodé pour  mieux s'intégrer au flux de son propre récit. Elle est aujourd'hui conservée, sous le numéro 793, à la fameuse collection Prinzhorn  de l'université d'Heidelberg.




Elle a inspiré à Rosalind Wyatt  le joli (un peu trop peut-être) projet  The Stitch Lives of Others, à travers lequel elle a élaboré le récit de la vie des arrière arrière-grands parents de son mari, Daniel Tuke, médecin aliéniste, pionnier de la réforme de la psychiatrie, et Esther Strickley, amatrice des dernières modes, en brodant sur un corsage en soie trouvé dans les archives familiales des extraits de leurs correspondances respectives avec du fil ayant appartenu à son aïeule, retraçant une part de leurs voyages  à travers les hôpitaux psychiatriques d'Europe .




gua6

bodice








---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------




Sur la broderie comme cri silencieux, voir le désespoir brodé en lettres rouges d'Elizabeth Parker, institutrice dans un petit village du Sussex au XIXe siècle ou le grand rouleau de Lorina Bulwer, internée au Great Yarmouth Workhouse vers 1900.



elizabeth_parker2



Sur  les écritures lingères et la mémoire,  voir  le beau travail de Marie-France Dubromel, mercière ambulante, sur les traces d'Yvonne Verdier.

Publicité
Publicité
Commentaires
S
Je pense que c'est vous qui m'avez fait connaitre des travaux d'art qui<br /> s'appuient sur la reprise, le soutien, le maintien, la continuité, la résistance, avec une aiguille, du fil, et, des tissus...<br /> Autant dire, la recette de la madeleine de Proust...en "ouvrage de dames".<br /> J'ai conservé de ma grand mère, des torchons, coussins, ravaudés.<br /> Je les chéris, encore et vous remercie de vous.
H
C'est trés fort,trés émouvant...dérangeant..
L
I just love natural cloth material, not sure why. It is like having a new blank page writing pad.
C
Ni dehors ni dedans, no limits... no lines, no borders... pour un corps enfermé. Mots du dedans proclamant l'écorchée vive sur les lambeaux retournés, ravaudés de la douleur qu'on ravale... C'est poignant, ça gueule dans le silence. Merci absolument pour cette découverte.
U
Another beautifully researched and presented post! No matter our sanity we still have a need to 'leave something' of ourselves behind... inspiring and touching.<br /> Ulla
Publicité