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Deux cent soixante et onze œuvres non répertoriées de Picasso, neuf collages cubistes, des aquarelles de la période bleue, des carnets de dessins, datant de 1900 à  1932, ont récemment refait surface.  Des retraités, un ancien électricien et sa femme, prétendent les avoir reçues en don du peintre. La fondation Picasso, affolée par la valeur prodigieuse de ces œuvres exclues de l'héritage,  a décidé de porter  plainte contre le couple pour recel.


Ce qui est mis en doute, ce n'est pas l'authenticité des œuvres : selon les experts, aucun faussaire n'aurait pu maîtriser des techniques aussi diverses et connaître les numéros d'inventaire inscrits sur certains dessins dans la perspective du divorce d'avec Olga. Non, c'est l'authenticité du geste de don, compte tenu des pratiques de Picasso en la matière : très conscient de la valeur de son œuvre et de sa vie, il  datait tout avec un soin maniaque et quand il donnait, dédicaçait, afin de faire de sa signature une possible monnaie d'échange  pour un bénéficiaire dans le besoin.

Claude Picasso, interrogé par Libération, s'explique ainsi.

" Quel effet cette découverte vous a-t-elle fait ?

Une très grande surprise, naturellement. Beaucoup d’émotion, à découvrir des pièces que nous ne connaissions pas. Mais aussi un grand trouble. Beaucoup de ces pièces ne sont pas datées, ce qui signifie qu’elles n’auraient jamais dû quitter l’atelier. Quand on regarde l’œuvre de mon père, il voulait systématiquement tout dater. Il marquait ainsi sa volonté de documenter ce qu’il savait être une aventure du siècle. Il gardait tout : les lettres, les tickets de métro, les billets de théâtre ou de corrida. Même les ficelles qui entouraient le volumineux courrier qui lui était apporté chaque jour… Il se disait qu’elles pouvaient toujours servir - recyclées comme on dit aujourd’hui - dans un tableau. Il l’a fait pour certains de mes jouets : 200 000 petits objets ont ainsi été conservés dans les archives. Il ne se séparait jamais de morceaux de son œuvre en bloc.

Il arrivait pourtant à Picasso de faire des cadeaux...

Donner une telle quantité, ça ne s’est jamais vu, cela ne tient pas debout, franchement. C’était une partie de sa vie. Cela n’a pas de logique, puisqu’on retrouve des lithographies en plusieurs exemplaires, ou des paquets qui correspondent à des périodes bien précises. Certes, Pablo Picasso était assez généreux. Mais il datait, signait et dédicaçait toujours ses dons, d’autant qu’il savait que certains les vendraient pour faire face à leurs besoins."





Nature morte : pipe et bouteille, un des neufs collages cubistes réapparus. Fondation Picasso