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Le Divan Fumoir Bohémien
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Le Divan Fumoir Bohémien
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14 septembre 2011

Les surprises d'Arthénice

 

 

malvasia rubelli

poussin numa condé chantilly

 

 

Au sein de l'hôtel de Rambouillet, rue Saint-Thomas-du-Louvre, un espace détaché du réel,  un monde enchanté. Quand partout ailleurs les murs sont sombres et sourds, d'un rouge brunâtre, "tanné", une chambre tapissée de brocart d'or mêlé d'argent, des fauteuils de velours bleu, un baldaquin d'organdi, des vases de cristal, des paravents, des pétales de fleurs, de larges fenêtres ouvrant sur un jardin donnant l'illusion de la campagne. La chambre bleue où Mme de Rambouillet, ou Arthénice (anagramme de Catherine), recevait ses intimes, loin des pesanteurs de la cour et de ses intrigues.

"La marquise a trouvé l'art de faire une place de médiocre grandeur, un palais  d'une vaste estenduë. L'ordre, la régularité et la propreté sont dans tous ses appartements et à tous ses meubles : tout est magnifique chez elle, et mesme particulier : les lampes y sont différentes des autres lieux, ses cabinets sont pleins de mille raretez qui font voir le jugement de celle qui les a choisies. L'air est toujours parfumé, diverses corbeilles magnifiques pleines de fleurs, font un printemps continuel dans sa chambre, et le lieu où on la voit d'ordinaire et si agréable et si bien imaginé qu'on croit estre dans un enchantement. " écrit Mlle de Scudéry dans Le Grand Cyrus.

Un lieu où cultiver les délicatesses de la civilité,  les joies de la conversation, l'art des facéties,  "Le perfectionnement du langage, le plaisir d'écrire et de s'écrire, de varier les formules, de se faire des surprises, de s'évader des conduites apprises, le goût de s'inventer" qui, selon Chantal Thomas, dans son charmant petit livre L'esprit de conversation, "rapprochent les échanges de la chambre bleue d'un roman en train de s'écrire", dans un incessant jeu de miroirs entre la littérature et la vie.

La féerie ne se nourrit pas seulement des jeux poétiques et des inventions langagières mais aussi de la volonté permanente de surprendre. Simples plaisanteries, proches de la farce, où l'on fait apparaître un ours derrière un paravent, où l'on rétrécit en cachette les habits d'un convive pour lui faire croire qu'il a enflé d'avoir mangé des champignons vénéneux. Coups de théâtre où la maîtresse de maison ouvre devant ses invités ébahis une nouvelle pièce superbement éclairée quand quelques jours avant il n'y avait qu'un mur recouvert d'une tapisserie. Exploits scénographiques encore, souligne Benedetta Craveri :

Dans son château de campagne, Mme de Rambouillet invite l'illustre évêque de Lisieux à faire une promenade. "Tout en conversant aimablement, ils étaient arrivés en un point de la propriété d'où l'on pouvait  apercevoir, en partie cachés par les arbres, de grands rochers disposés en cercle. En s'approchant, l'évêque avait eu l'impression d'entrevoir un étrange  scintillement et des silhouettes féminines pareilles à des nymphes, en effet, parvenu à l'arène rocheuse, 'voici Mademoiselle de Rambouillet et toutes les jeunes filles de la maison , vestues comme des nymphes et assises sur les rochers qui formaient le plus gracieux spectacle du monde'".

 

 

 

 

 Tissu Rubelli Malvasia colibri ; détail de Numa Pompilius et la nymphe Egérie de Poussin, musée Condé, Chantilly

 

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Commentaires
A
bon bloganniversaire
A
oh...l'anagramme du prénom chante tellement mieux ! et puis ce jeu de miroir entre la littérature et la vie...<br /> <br /> je dévore donc quelques œuvres littéraires d'ici dimanche afin de répondre au mieux à cette charmante invitation au château pour y boire un soit disant thé...!
B
à votre blog sur canalblog! je le découvre avec plaisir, belle page d'histoire<br /> Florence
G
jolie Histoire<br /> quelle malice!
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