Des vêtements, blancs pour la plupart, anciens et usés - brassières de bébé, guimpes, sarraus, chemises, culottes fendues, caracos, blouses - des mouchoirs, des bouts de tissu, des chaussettes, des gants, en suspension comme dans la salle des pendus où les mineurs attachaient leurs vêtements à des cordes en guise de vestiaire : des enveloppes de corps désormais disparus. Mais ce qui, à première vue, apparaît comme une procession fantomatique devient, quand on s'approche, une humanité bruissante de vie.
Marie-France Dubromel a brodé des phrases sur toutes les pièces de l'installation , "histoire de vécu," en utilisant une écriture lingère rapide, celle des blanchisseuses, au fil rouge, couleur traditionnelle du marquage du linge. Phrases recueillies auprès de femmes et d'hommes ordinaires, phrases issues de poèmes, de livres, elles donnent au linge une mémoire.
Mémoire plurielle car la phrase n'a pas de lien biographique avec le vêtement sur lequel elle est apposée : c'est la rencontre de deux vies étrangères l'une à l'autre.
Mémoire polyphonique car lorsque le visiteur circule à travers les vêtements et accessoires, des jeux inattendus de correspondance se mettent en place. Dans la trame lâche d'une chemise trop usée, à travers la déchirure d'un monogramme, dans les jours de Venise, dans les trous d'une reprise, des voix chuchotent et se répondent, liant l'intime au collectif.
Au milieu de ce labyrinthe en mouvement, notre mercière ambulante a pris soin de laisser un fil rouge avec une aiguille pendre d'un vêtement comme une invitation à venir inscrire à notre tour nos souvenirs de vie minuscule étrangement avivés par la sensation du linge. Une croix suffira peut-être à dire combien nous avons été émus.
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Suivez le fil rouge, à l'écu d'or, à Viroflay, jusqu'au 31 janvier