Etendues glaciales
L'idée d'Étendues glaciales est venue à Jorma Puranen,
l'un des chefs de file de la photographie finlandaise, en contemplant
les touristes au Cap Nord, cette extrémité septentrionale de
l'Europe après laquelle il n'y a plus d'autres terres que les îles
de l'archipel du Svalbard. Là, sur les falaises embrumées,
ils lui apparaissaient plongés dans une intense rêverie sur l'au-delà
du
cercle polaire et ses contrées imaginaires.
Mais c'est
aussi en collectant récits d'expéditions polaires et tableaux les
représentant qu'il a cheminé vers ce nouveau projet. De manière
générale, il aime à utiliser une abondance de sources historiques
visuelles et littéraires (photographies anthropologiques, cartes
anciennes, récits, comptes rendus savants illustrés) pour rendre
sensible la matrice de rencontres et de connexions propre à chaque lieu
tout en faisant une fabrique à rêveries et à visions imaginaires.
Il dit également chercher à faire obstacle à la contemplation
directe de la beauté du paysage en plaçant des obstacles entre le sujet
et le spectateur : portraits sur transparents, citations latines,
drapeaux. Dans sa dernière œuvre, la possibilité d'une vision directe
est dès l'origine empêchée par le fait qu'il s'agit de reflets dans la
glace, un jeu autour des mots de Jean-Luc Godard selon lesquels "la
photographie n'est pas le reflet de la réalité mais la réalité du
reflet". Toutefois, on reste plus séduit par ses références au sublime
et à l'hallucinatoire que par son discours pompeux sur la qualité de
"poétique historique" qu'il tente d'attribuer à son art.